Cryptogramme

Note de présentation
Dans ce court film, intitulé Cryptogramme, réalisé en 2002, vous pourrez entendre un vrai bègue, Tony Petite, rencontré sur le tournage d’un film précédent, le Singe de la lumière. L’expérience est ironique. Il s’agit d’un rébus. Le film rend hommage au cinéma structurel américain. On peut penser aux films d’Hollis Frampton, de Michael Snow et aux premiers films, plus tardifs, de Peter Greenaway. La première partie expose les termes de la cryptographie et voit se succéder différents masques qui forment une phrase. La seconde partie, sous forme de coda, révèle « l’alphabet des masques » (chaque masque est associé à une lettre). Il est impossible, bien sûr, de deviner la phrase précédente constituée par la succession apparemment arbitraire des masques. Il faudrait une mémoire prodigieuse, digne du personnage de Jorge Luis Borges, Funes, pour remembrer les plans précédents et les associer aux lettres correspondantes. Dans sa nouvelle, Funes ou la Mémoire, Borges invente un système original de numération, singularisant chaque nombre, incapable d’idées générales. « Au lieu de sept mille treize, il disait (par exemple) Maxime Pérez ; au lieu de sept mille quatorze, le chemin de fer ; d’autres nombres étaient Luis Melián Lafinur, Olimar, soufre, trèfle, la baleine, le gaz, la bouilloire, Napoléon, Augustin de Vedia. Au lieu de cinq cents, il disait neuf. » Chaque mot avait son signe particulier. Il était rebelle au principe même de la numération. Funes aurait mémorisé chaque plan de Cryptogramme et aurait mentalement recomposé la phrase. Vous n’êtes pas Funes. Dois-je vous livrer le secret ? Un film a-t-il pour vocation de s’adresser au spectateur ?